L’impact de la corruption sur l’investissement privé au Burundi: Une étude comparative avec les autres pays de la communauté Est-Africaine

UNIVERSITE DU LAC TANGANYIKA

RésuméLa littérature économique montre que, du fait du comportement rentier et prédateur qu’entretient la corrup-tion, celle-ci étouffe l’esprit d’initiative et d’entreprise, agit comme une taxe supplémentaire d’investissement qui décou-rage les investisseurs locaux et étrangers, lesquels préfèrent des activités de spéculation et de courte échéance à la place des investissements de grande envergure. Sous cette hypothè-se, cet article analyse, pour le cas du Burundi et en comparai-son avec les autres pays de la Communauté est-Africaine (CEA), l’impact de la corruption sur l’investissement privé. Après avoir commenté le phénomène et le niveau de corrup-tion ainsi que la dynamique de l’investissement privé au Bu-rundi, nous testons une équation de l’investissement privé dans lequel nous insérons, en plus des autres variables de contrôle, le niveau de corruption sur la période de 1996-2013. Les résultats obtenus avec la méthode des moindres carrés ordinaires (MCO) confirment l’effet négatif de la cor-ruption sur l’investissement privé au Burundi et montrent que cet effet est amplifié par les crises socio-politiques que le pays a eu à traverser.

Mots clés : Corruption, Investissement privé, crise socio-politique, MCO, Burundi

Abstract: The economic literature shows that, because of the behavior man of means and predatory that maintains the corruption, this one chokes the mind of initiative and enter-prise, acts like a supplementary tax of investment that dis-courages the local and foreign investors, who prefer activities of speculation and short term instead of the large scale invest-ments. Under this hypothesis, this article analyzes, for the case of Burundi in comparison with the other countries of the East African Community (EAC), the impact of the corruption on the private investment. After having commented the phe-nomenon and the level of corruption as well as the dynamics of the private investment in Burundi, we test an equation of the private investment in which we insert, in addition to the other variables of control, the level of corruption on the pe-riod of 1996-2013. The results gotten with the method of the Ordinary Least Squares (OLS) confirm the negative effect of the corruption on the investment deprived in Burundi and show that this effect is amplified by the socio-politic crises that the country had to traverse.

INTRODUCTION

Depuis une décennie, le Burundi fait partie des pays les plus corrompus de la planète. Les rapports de Transparency International (TI) montrent que depuis 2005, la corruption n’a cessé de s’aggraver jusqu’à ce que le Burundi soit parmi les 20 pays les plus corrompus de la planète et le pays le plus cor-rompu de la communauté Est-Africaine (CEA). En effet, alors qu’en 2006 le Burundi occupait la 130ème place sur 159 pays soumis à l’évaluation, ce score s’est dégradé jusqu’à se clas-ser au rang de 172ème place sur 182 pays en 2011 et au 165ème sur 176 en 2012.

En 2015, le Burundi se classe toujours parmi les pays les plus corrompus de la planète puisqu’il occupe un rang de 150ème position sur un total de 167 pays. Parmi les principales causes à l’origine de cette situation, il faut citer la guerre civi-le qui a sévi au Burundi pendant plus de dix ans consacrant l’inflation des pratiques néo-patrimoniales (ICG, 2012: 2-10) et les pesanteurs socio-institutionnelles de nature à inciter le fonctionnaire à corrompre (Nimubona 2008:18-30). Les statis-tiques de la Banque mondiale (World Bank 2012/2013: 28) indiquent qu’au cours de la décennie 2010, le Burundi a enre-gistré en moyenne, et en pourcentage du PIB, 5,3% d’investis-sements privés derrière le Rwanda (10,2%), le Kenya (12,6%), l’Ouganda (16%) et la Tanzanie (17,5%). Or, dans les pays en développement, la littérature économique montre que la corruption est donnée comme l’un des principaux fac-teurs de la faible croissance économique; l’un des canaux de

transmission de cet effet étant l’investissement aussi bien pu-blic que privé (Mauro 1995:683; Baliamoune-Lutz et Ndiku-mana 2008:7-13). Peut-on voir dans cette faible performance de l’économie burundaise l’impact de la corruption? Telle est la raison qui nous pousse à rechercher l’impact de la corrup-tion sur l’investissement privé au Burundi en comparaison avec les pays de la CEA.11 Nous partons de l’hypothèse que, dans les pays en développement, la corruption étouffe l’esprit d’initiative et d’entreprise (Hadhek Zouhaier 2011:2) et qu’en accroissant les coûts et les charges pour les entreprises et par conséquent l’incertitude quant au retour sur investissement attendu, elle décourage l’investissement privé (Baliamoune-Rutz et Ndikumana 2007:14).

La question de l’impact de la corruption sur l’activité économique en général et l’investissement privé en particulier est d’autant plus justifiée qu’une autre thèse soutient que la corruption servirait à «graisser les rouages» de l’activité éco-nomique privée (Lui 1985:3-21). L’article s’articule autour de trois sections. La première section est consacrée à une brève revue de littérature sur l’effet de la corruption sur l’investisse-ment privé. La deuxième section commente l’évolution de l’investissement domestique privé et de la corruption au Bu-rundi en essayant une mise en perspective entre les deux. La troisième section expose la méthodologie, l’analyse et l’inter-prétation des résultats.

11Nous limitons cette comparaison à l’analyse descriptive juste pour analyser les dynamiques de la corruption et de l’investissement privé au Burundi dans une perspective sous-régionale. Cela nous permet de saisir l’ampleur de la corruption et la dynamique de l’inves-tissement privé au Burundi vis-à-vis de la sous-région.

  1. Revue de littérature sur l’effet de la corruption sur l’investissement privé

Il est vrai que la littérature fait remonter l’économie de la corruption à Nathan Leff (1964) et Rose-Ackerman (1975). Cependant, les recherches empiriques renouent avec cette branche de l’économie depuis le travail inaugural de Mauro (1995: 683) qui fournit les premiers résultats empiriques indi-quant que la corruption affecte négativement la croissance économique.

Cette étude montre que l'ampleur des effets de la corrup-tion est considérable: une amélioration d'un écart-type de l’in-dice de corruption aurait pour effet une hausse de l’investisse-ment de 5 % du PIB et de 0.5 % du PIB par habitant. L’étude parvient par ailleurs à la conclusion selon laquelle «a large portion of the effects on economic growth takes place through the effects on investment», des effets qui représenteraient en-viron un tiers des effets sur la croissance.

Dans «The effets of corruption on Growth, Investment and Government Expenditure», Mauro (1996:9-16) trouve encore que la corruption peut avoir des effets néfastes consi-dérables sur la croissance économique, en grande partie par le biais de la réduction de l'investissement privé, mais aussi à travers une variété d'autres canaux comme la distorsion de la composition des dépenses publiques. Plus précisément, l’étu-de fait mention d’une relation négative et significative entre la corruption et les dépenses publiques d'éducation; un fait inquiétant puisque la théorie de la croissance endogène montre que le capital humain est un déterminant important de la croissance économique. A leur tour, Baliamoune-Lutz et Ndi-kumana (2007:7-13) examinent, pour 33 pays africains, l'im-pact de la corruption sur l'investissement (public et privé), considéré comme un canal par lequel la corruption sape la croissance. Leurs résultats empiriques indiquent que la cor-ruption affecte directement la croissance économique mais aussi à travers son impact sur l'investissement. Ces auteurs constatent que la corruption a un effet négatif et significatif sur l'investissement intérieur mais qu’elle affecte différem-ment l'investissement public et privé.

En ce qui concerne l’investissement privé, l’étude montre que la corruption agit comme une taxe sur le capital, mais, contrairement aux prélèvements fiscaux officiels, elle est in-certaine et imprévisible, et par conséquent difficile à internali-ser. Or, dans une telle situation, étant donné que la corruption a tendance à se perpétuer, la possibilité de différer les inves-tissements perd de son intérêt et les investisseurs auront ten-dance à privilégier les activités à échéance plus courte telles que les échanges commerciaux et la spéculation au lieu de l’investissement à long terme. Si la corruption affecte négati-vement l’investissement local, elle décourage aussi les IDE. Cela ressort des résultats empiriques de Wei (2000a:3-8), qui, sur un échantillon couvrant les investissements bilatéraux de douze pays d'origine de 45 pays d'accueil, trouve que la haus-se du niveau de corruption dans un pays d'accueil réduit les

investissements directs étrangers (IDE) de la même façon que le ferait une augmentation du taux d'imposition sur les socié-tés multinationales. Selon cette étude, une hausse de la cor-ruption du niveau de la Singapore à celui de la Mexique aurait le même impact négatif sur les IDE entrant que si la Singapo-re avait augmenté la taxe de 18 à 50 %. Cette idée est défen-due aussi par Bandeira et al. (200:14-18). Pour eux, la corrup-tion décourage les IDE par son effet négatif sur la productivité des facteurs, en particulier le capital. Ce serait, d'après les conclusions de cette étude, le mécanisme principal par lequel la corruption réduit le revenu/tête dans une économie.

Ces auteurs expliquent que la corruption peut refouler les IDE lorsque les organismes publics d’un pays donné, contrô-lés par des politiciens et des bureaucrates, exigent des pots-de -vin aux agents privés en charge de la mise en œuvre des pro-jets d’investissement. Or, considérant que ces "coûts infor-mels" diminuent la rentabilité de ces entreprises, les investis-seurs étrangers préfèrent placer leur argent dans les pays moins enclin à la corruption. Cet effet négatif de la corruption sur la productivité du capital est aussi mis en évidence par De Rosa et al. (2013:15-26). Au niveau microéconomique, les auteurs avancent un certain nombre de raisons de s'attendre à des conséquences négatives de la corruption sur la productivi-té. Tout d'abord, la corruption fausse la répartition des res-sources publiques en les détournant de leur usage le plus pro-ductif. Ensuite, parce qu’elle agit comme une taxe informelle, la corruption ne peut pas inciter les entreprises à réaliser l'expansion de leur capacité de production ou d'investissement. Toutes choses égales par ailleurs, cela devrait avoir un effet négatif sur la productivité. Enfin, la corruption impacte l’in-vestissement à travers l’allocation des talents. A ce sujet, Murphy, Schleifer et Vishny (1991: 522-529) font remarquer que dans la plupart des pays corrompus, la recherche de rente récompense le talent plus que l'entrepreneuriat, ce qui ne fa-vorise guère l’innovation et mène, à la longue, à la stagnation économique. Ils avancent par ailleurs que l’extorsion d’Etat risque de pénaliser spécialement l’innovation dans la mesure où les innovateurs ont souvent, de par la nature de leur activi-té, besoin de facilités et de permis spéciaux. Or, étant donné qu’ils sont rarement des «insiders» des cercles politiques pro-tégés, les innovateurs obtiennent ces facilités difficilement.

Pour ces auteurs, l’extorsion de type mafieux risque de pénaliser particulièrement les activités exigeant l’accumula-tion d’actifs visibles et vulnérables. Cependant, Mahagaonkar (2008: 15) montre que l’effet de la corruption est différent selon le type d’innovation. Selon lui, la corruption affecte né-gativement l'innovation de produit, innovation de procédé et l'innovation organisationnelle mais contribue à améliorer l'in-novation marketing.12 Ce qui montre, en réalité que la corrup-tion déprime, une fois de plus, l’investissement privé.

12J.A Schumpeter (1951) distingue 5 types d’innovation : (i) les innovations de produits (des produits nouveaux qui accroissent la diversité et se traduisent par une amélioration qualitati-ve), (ii) les innovations de procédés (nouvelle méthode de production ou de transport), (iii) la découverte d’une nouvelle source de matière première ou d’énergie (l’utilisation du pétrole ou de l’uranium enrichi), (iv) les nouveaux types d’organisation et enfin (v) les innovations commerciales, c’est-à-dire les nouvelles méthodes de commercialisation et de distribution.

Notons à toutes fins utiles qu’il n’y a pas que la thèse des effets néfastes de la corruption sur l’activité économique qui est soutenue dans la littérature théorique et empirique. Une autre thèse soutient que la corruption peut, dans certaines si-tuations, servir à «huiler l’activité économique». Cette hypo-thèse suggère que la corruption peut être salutaire dans un «second best world» à cause des distorsions causées par les institutions qui fonctionnent mal. La raison en est qu'une bu-reaucratie inefficace constitue un obstacle à l’investissement que quelque «speed or grease money» peut contribuer à faire échouer (Méon et Sekkat, 2005:70). Huntington (1968:59-71) et Lui (1985:3-21), qui avancent pour la première fois une tel-le thèse, soutiennent que certains aspects de mauvais fonction-nement de la bureaucratie tels que la lenteur, les files d’attente peuvent être compensées par la corruption.

Méon et Sekkat (2005:75-91), dans «Does corruption grease or sand the wheels of growth? », testent cette thèse sur un échantillon de 63 à 71 pays entre 1970 et en 1998. Ils trou-vent que les effets ont tendance à s'aggraver lorsque les indi-cateurs de la qualité de la gouvernance se détériorent. Leurs résultats confirment largement «le sable plutôt que la graisse dans les rouages de la croissance » contredisant de fait la thè-se qui postule que la corruption servirait à compenser la mau-vaise gouvernance. A ce sujet, De Rosa et al. (2013:8-26) ont trouvé des conclusions allant dans le même sens. Ils ont cher-ché à comparer l’impact des taxes de pot-de-vin sur la produc-tivité aux conséquences de la longue bureaucratie considérée

comme une «taxe de temps» sur les entreprises. Utilisant les données-entreprise pour les économies de l’Europe centrale et de l’est, cette étude trouve que seulement l'impôt du pot-de-vin paraît avoir un impact négatif sur la productivité des fir-mes, pendant que l'effet de l'impôt-temps est insignifiant. Il apparaît, dans cette brève revue théorique et empirique, que la corruption exerce généralement un effet négatif sur l’investis-sement privé même si cela reste sujet à controverse. Avant de faire une analyse empirique des effets de la corruption sur l’investissement privé au Burundi, nous esquissons un état des lieux concernant le phénomène de la corruption et l’évolution de l’investissement privé dans ce pays.

  1. Etat de la corruption et de l’investissement privé au Burundi

Cette section vise à faire une mise en perspective de la corruption avec l’investissement privé au Burundi. Pour une meilleure compréhension de l’ampleur de la corruption et du niveau de l’investissement privé, cette section essaie de situer, de temps à autre, le cas du Burundi en comparaison avec les autres pays de la CEA.

2.1. Le niveau et l’ampleur de la corruption au Burundi

Dans ce qui suit, pour commenter le phénomène de la corruption au Burundi, nous partons d’un graphique qui mon-tre la tendance de la corruption dans les cinq pays de la Com-munauté Est Africaine.

Cela nous permet de mettre en évidence le niveau et l’ampleur de la corruption au Burundi en comparaison avec les autres pays de la sous-région. A cet effet, nous nous ser-vons du niveau de corruption mesuré par l’indicateur de la Banque Mondiale, qui fait partie des six indicateurs de gou-vernance présentés par Kaufmann et al. (2003)13. La variable de corruption est initialement codée entre -2.5 et 2.5 et reflète le contrôle de la corruption. Nous transformons cette variable pour disposer d’un indicateur qui représente le niveau de cor-ruption et prenne des valeurs comprises entre 0 et 5.

Le graphique suivant montre l’évolution de cet indice pour le cas du Burundi et les autres pays de la CEA au cours de la période 1996-2011.

Graphique 1 : Evolution de la corruption dans les pays de la zone EAC

 

 

13Nous aurions dû utiliser l’indice de perception de la corruption (IPC) de TI mais celui-ci ne couvre malheureusement pas, pour tous les pays, toute la période qui nous intéresse.

 

Tel qu’il ressort de ce graphique, le Burundi est perçu depuis 2005 comme le pays le plus corrompu, suivi du Kenya, de l’Ouganda et de la Tanzanie et enfin du Rwanda14. Ce gra-phique montre ainsi qu’au Burundi, non seulement la corrup-tion ne cesse de s’amplifier, mais également que le pays enre-gistre de très mauvais résultats par rapport à ses voisins de la CEA. Selon une étude menée en 2007, les secteurs publics les plus affectés par la corruption sont: l’éducation, la santé, la justice, la police, l’administration, la distribution de l’aide, les marchés publics, les services des douanes ou des impôts (International Alert/DAI/GRADIS 2007:14).

 

Les études sur la corruption au Burundi identifient plu-sieurs facteurs à l’origine de cette situation dont le principal est la crise politico-sécuritaire que le pays a traversé depuis 1993. A ce propos, le rapport ci-dessus montre qu’au Burundi, l’aggravation de la corruption ne saurait être séparée des tur-bulences que le pays a connues et l’incertitude qu’elles ont générées pour les citoyens et les dirigeants. Tout particulière-ment, la dernière crise a affecté profondément le fonctionne-ment des structures de l’Etat, laminé son autorité et précipité la détérioration des conditions de vie. Cette étude montre que la corruption qui semblait être relativement contenue avant le déclenchement de la crise de 1993, le développement des comportements corruptifs a trouvé un terreau favorable dans le dérèglement de l’autorité et les dysfonctionnements de l’E-

  1. Le Rwanda se démarque du lot comme le pays le moins corrompu de la zone avec un indice qui s’améliore chaque année. Aujourd’hui, ce pays est classé parmi les 50 pays les moins corrompus de la planète.

 

tat consécutifs à cette dernière (idem 2007:25). Une autre étu-de, celle de l’international Cris Group (ICG) abonde dans le même sens et indique que la crise socio-politique qui a sévi au Burundi depuis 1993 a consacré l’inflation de la corruption et les pratiques néo-patrimoniales (ICG 2012:1-12). Selon ce rapport, les pratiques néo-patrimoniales se sont particulière-ment amplifiées depuis les élections de 2005 qui ont vu l’ac-cession au pouvoir de l’ancienne rébellion armée CNDD-FDD15. Mandjem, citant Weber, dit que le patrimonialisme se caractérise par l’absence de différenciation entre le public et le privé, puisque le « chef patrimonial traite toutes les affaires politiques, administratives ou judiciaires comme s’il s’agissait d’affaires personnelles, de la même façon qu’il exploite son domaine, comme s’il s’agissait de propriétés privées » (2009:98).

 

Ainsi, le néo-patrimonialisme est une adaptation de ce sous-type wébérien et l’Etat néo-patrimonial est un Etat dont le mode de gestion et la logique de fonctionnement entretien-nent la confusion entre le public et le privé. Il en a été le cas au Burundi car, dans le conflit politico-ethnique qui a déchiré le pays, la lutte pour l’accès au pouvoir a porté sur le contrôle de l’appareil étatique et de ses prébendes. De fait, dans le contexte d’un secteur privé embryonnaire, l’accès à la haute fonction publique et à ses avantages ainsi que le contrôle des marchés publics et des administrations financières sont perçus comme la voie royale vers l’enrichissement (ICG 2012:1).

  1. Conseil national pour la Défense de la Démocratie- Forces de Défense de la Démocratie

 

Le même rapport mentionne par ailleurs que, sous l’effet de l’ampleur de la crise économique et pour éviter l’étrangle-ment, le pouvoir de l’époque a dû laisser libre cours à «l’inventivité» des opérateurs économiques. Les autorités ont laissé se développer, voire parfois organisé, des réseaux de contrebande afin d’atténuer la pénurie sur le marché local, laissant par conséquent une corruption institutionnelle s’ins-taller. La longue période de transition (2001-2005), où le pou-voir était fortement dilué dans un système institutionnel qui comprenait dix-sept partis politiques, a favorisé les mauvaises pratiques socioéconomiques de nature à favoriser des prati-ques corruptives.

 

Des pratiques qui n’ont pas disparu à la sortie de cette période de transition qui a vu le parti CNDD-FDD accéder aux commandes du pays. Au contraire, ces pratiques corrupti-ves et néo-patrimoniales réapparaissent sous des formes déjà connues par le passé, mais avec une ampleur inconnue jus-qu’ici (ICG 2012: 3-5). Au-delà de la crise, les pratiques cor-ruptives sont, au Burundi, encouragées par des pesanteurs so-ciaux contraignants et les soubassements historico-culturels favorables à celles-ci. A ce sujet, Nimubona montre que, plus qu’un phénomène encastré dans le social, la corruption est devenu un phénomène social. En effet, elle est le résultat d’é-changes et d’interrelations matériels et représentationnels en-tre les membres de la société à cause des référents historico-culturels qui transforment les règles «publiques» et expliquent la tolérance ou la complaisance à l’égard des comportements

 

et pratiques corruptifs ainsi que les inefficiences de l’Etat et de la société face à la corruption. Il s’agit, pour l’auteur, des éléments qui véhiculent la culture de sujétion et donc de clien-télisme et, par conséquent, favorables à la corruption. Aussi, cite-t-il, pour étayer ces pratiques, une série de dictons ou de maximes qui cachent l’intention de corrompre ou d’être cor-rompu : « Ushengera ata mpamba ugashenguruka ata jam-bo » (« Si vous allez demander un service sans vous munir de quelque chose à donner, vous rentrez bredouille»);« Umu-savyi aberwa yikoreye » («Un bon client/un demandeur de service, c’est celui qui apporte quelque chose»); « Uruban-za rw-umukene rupfira mu ngemu » (« Le mauvais sort d’un pauvre vient de ce qu’il a peu ou rien à donner »), etc. (2008: 27). Enfin, dans ce contexte de crise et de pesanteurs sociales propices à des actes et pratiques corruptifs, ceux-ci trouvent un terreau dans un dispositif institutionnel de lutte contre la corruption inefficace.

 

Il est vrai que depuis 2005, un arsenal d’instruments juri-diques et d’organes de contrôle et de répression de la corrup-tion a été mis en place. Cependant, au-delà d’un déficit de moyens et l’incomplétude de l’architecture institutionnelle, le dispositif mis en place manque surtout d’indépendance. Du reste, à ce sujet, le rapport de ce dispositif pèche par le man-que d’un chainon clé, la Haute Cour de justice, non encore mise en place, ce qui rend impossible la mise en cause pénale des plus hautes autorités, c’est-à-dire le président, les vice-présidents et les présidents des deux chambres qui doivent

être jugés par ladite Cour (ICG 2012: 13). C’est pour cette raison que certaines suspicions ou dossiers de corruption im-pliquant les hautes autorités de l’Etat n’ont jamais fait objet d’instruction judiciaire. En guise d’exemple, on pourrait citer dans le cadre de ce travail, les cas de la vente frauduleuse de l’avion présidentiel, l’achat de matériel militaire défectueux, l’achat de l’avion présidentiel mais non fourni, etc16.

 

Il ressort de ce qui précède que la corruption a entraîné des conséquences fâcheuses sur l’économie du Burundi. Il s’agit, par exemple, de la détérioration de l’image du Burundi vis-à-vis des bailleurs de fonds et les partenaires de dévelop-pement, de la perte de recettes de l’Etat, de la détérioration de la qualité des infrastructures publiques, de la délocalisation des activités économiques et, naturellement, la faiblesse de l’investissement privé (ICG 2012:17-18).

 

Dans le point suivant, nous analysons le niveau et la dy-namique de l’investissement privé au Burundi en essayant de voir si le niveau de corruption y aurait un impact significatif.

 

2.2. L’environnement et la dynamique de l’investisse-

 

ment privé au Burundi

 

La courbe ci-dessous situe le niveau et l’évolution de l’in-vestissement privé du Burundi en comparaison des autres pays de la Communauté est-africaine.

 

  1. Pour de plus amples détails, cfr G. Rufyikiri, Corruption au Burundi : Problème d’action collective et défi majeur pour la gouvernance, Institut of Development Policy and Mana-gement, University of Antwerp, Working paper/2016.07.

Graphique 2: Evolution de l’investissement privé

 

dans l’espace EAC

 

Alors que nous venons de voir ci-haut que le Burundi est le pays le plus corrompu de l’EAC, il apparaît à travers ce graphique qu’il est aussi le pays qui affiche le plus faible ni-veau d’investissement privé de la sous-région. En effet, cons-titué de petites et moyennes entreprises qui, pour l’essentiel, opèrent dans l’économie informelle, le secteur privé du Bu-rundi est encore embryonnaire. D’après un rapport de la Ban-que Africaine de Développement ((BAfD/OCDE/PNUD 2014: 8), le secteur privé comprend environ 3 250 entreprises dans le secteur formel, pour la plupart petites et moyennes, localisées à plus de 80 % dans la capitale Bujumbura et em-ployant moins de 2 % de la population active. Pour plus de 65

 

  • d’entre elles, ces entreprises évoluent dans le secteur des services et moins de 10 % ont des activités industrielles. Le rapport montre cependant que dans l’ensemble, la part de l’investissement privé dans le PIB a notablement progressé, pas-sant de 2.2 % en 2000 à environ 16 % en 2013, du fait essen-tiellement des activités dans les secteurs du tourisme (hôtellerie), de la banque et des assurances. Ce niveau reste néanmoins faible en comparaison des autres pays de la sous-région et le Burundi peine à attirer des investissements directs étrangers (IDE) qui représentent moins de 5 % du PIB en 2013.

 

Plusieurs facteurs sont à la base de cette situation. D’a-près le rapport sur la compétitivité mondiale établi par le Fo-rum Economique Mondial (Schwab, 2012: 124), les princi-paux facteurs de la faible attractivité du Burundi pour les IDE sont l’accessibilité au financement, la corruption, l’instabilité politique, la fiscalité, l’inflation, etc. Le tableau ci-après, tiré de ce rapport, reprend, pour la période 2012-2013, les diffé-rents obstacles au développement des affaires au Burundi.

 

Tableau 1 : Principaux obstacles au développement

des affaires

 

En pourcentage des problèmes identifiés

%

 

 

 

1.

Accès au financement

19,8

 

 

 

2.

Corruption

18,5

 

 

 

3.

Instabilité politique

9,8

 

 

 

4.

Taux d’imposition

9,3

 

 

 

5.

Inflation

9,2

 

 

 

6.

Inefficacité de la bureaucratie publique

6,9

 

 

 

7.

Inadéquation des infrastructures

5,4

 

 

 

8.

Réglementation fiscale

5,0

 

 

 

9.

Inadéquation du système de formation

3,7

 

 

 

10.

Réglementation régissant l’accès aux devises

3,6

 

 

 

11.

Insuffisance des capacités d’innovation

2,3

 

 

 

12.

Crimes et vols

1,9

 

 

13. Réglementation du marché du travail

1,8

 

 

14. Faiblesse de l’éthique au travail

1,8

 

 

15. Instabilité gouvernementale et coups d’État

1,0

 

 

16. Défaillance du système de santé

0,0

 

 

 

Source: Schwab, K, The Global Competitiveness Report

 

Tel qu’il apparaît dans ce tableau, le faible accès au fi-nancement constitue le premier obstacle majeur à l’émergence du secteur privé au Burundi.

 

L’accès au crédit bancaire pour financer l’investissement s’avère compliqué car les banques s’intéressent souvent au financement d’opérations à courte échéance comme les tran-sactions commerciales internationales. Il s’ensuit que la cor-ruption constitue un autre obstacle majeur à l’initiative privée. Les dérives en matière de comportement public sont dénon-cées comme étant l’un des principaux maux dont souffre le Burundi, surtout dans le système et l’appareil judiciaires. Or, le dysfonctionnement du système judiciaire induit à la fois au caractère aléatoire et incertain des décisions et à la concurren-ce déloyale; ce qui est de nature à décourager l’investissement privé.

 

La concurrence déloyale s’opère aussi à travers la fraude fiscale. En effet, les services fiscaux et douaniers sont aussi cités comme étant fortement rongés par la corruption et le ver-sement de pot-de-vin. Pour payer moins d’impôts, les entre-prises privées qui ont un chiffre d’affaires élevé déclarent des sommes inférieures en versant des pots-de-vin aux fonction-naires du service fiscal (TI 2009:189). Même à la suite de la mise en place de l’Office Burundais des Recettes en 2010, qui constituait une réforme importante visant la maximisation de la collecte des impôts et taxes, il est malheureusement consta-té que les recettes internes affichent une tendance à la baisse, passant de 14,9% du PIB en 2011 à 13,7% en 2013 (Rufyikiri 2016: 17). Le troisième obstacle majeur qui freine l’investis-sement privé au Burundi réside dans la crise socio-politique qu’a connue le pays depuis 1993.

 

En réalité, depuis l’indépendance du pays en 1962, l’his-toire du Burundi est parsemée par des cycles de violences in-ter-ethniques en 1965, 1969, 1972, 1988, 1991 et 1993. Cette dernière, qui a officiellement pris fin en Août 2000 suite à la signature de l’Accord d’Arusha mais qui s’est effectivement terminée en 2008, a entrainé la destruction de la quasi-totalité des infrastructures et des systèmes de production. Le système éducatif est l’un des secteurs qui a souffert de cette dernière crise. Cela n’a pas manqué d’impacter le secteur privé qui a besoin d’un personnel de qualité pour émerger.

 

A ce sujet, en plus de la qualité de la formation suffisam-ment entamée par la crise socio-politique ces dernières an-nées, il se pose le problème de l’inadéquation entre l’offre de formation et les besoins réels des entreprises. Cela est princi-palement dû au déficit de la politique éducative orientée vers la formation professionnelle. A titre d’exemple, durant l’exer-cice 2012, le budget alloué au ministère de l’éducation pri-maire, secondaire, professionnelle et de l’Alphabétisation des Adultes s’est élevé à 162 milliards de FBu.

 

Sur ce budget, la part de l’enseignement professionnel n’était que de 2,4 milliards de FBu, soit moins de 1,5 %, tout cela conjugué avec des infrastructures publiques de formation professionnelle ou continue notoirement en deçà des besoins nationaux (BAD 2012:26). La plupart des autres contraintes à l’investissement privé au Burundi, tel que le manque d’infras-tructure, l’insuffisance et le surcoût énergétique, l’environne-ment macroéconomique malsain ou l’inefficience fiscale

 

prennent racine dans cette crise socio-politique qui a perduré au Burundi et de l’insuffisance des dépenses publiques qui en a découlée, en quantité et en qualité. Il faut ajouter à cette lon-gue liste des contraintes, l’enclavement dont souffre le pays, lequel se répercute sur le coût de certains facteurs. En dépit de tous ces problèmes qui minent l’émergence de l’investisse-ment privé au Burundi, des avancées notables en matière de réformes dans plusieurs secteurs sont à mettre au crédit du gouvernement. En 2010, il a créé l’Agence Burundaise pour la Promotion des Investissements (API). Ceci a permis d’amé-liorer certains indicateurs du «Doing business». Par ailleurs, dans le cadre de la CEA, le gouvernement est en train d’har-moniser sa législation fiscale (BAD 2011:5).

 

Cependant, les impôts et taxes sur le revenu les plus éle-vés de la CEA n’encouragent guère les investisseurs privés. Or, le Burundi est devancé par tous les autres membres de la CEA en ce qui concerne le niveau de corruption, les perfor-mances économiques, l’accès aux infrastructures de base et la capacité énergétique, l’accès au financement et se trouve être le pays le plus enclavé de tous et le plus instable jusqu’à ce jour. Cela ne favorise guerre l’attractivité des investissements privés au Burundi dans la mesure où le comportement ration-nel des investisseurs potentiels les pousse à se tourner vers les pays voisins plus attractifs. Il apparaît de ce qui précède que la faible performance du Burundi en termes d’attraction de l’investissement privé est le résultat de plusieurs facteurs conjugués, dont la corruption.

 

Dans la section suivante, nous procédons à l’analyse em-pirique pour voir si les résultats économétriques corroborent cet impact de la corruption sur l’investissement privé.

 

3. Méthodologie d’analyse, résultats et interprétation

 

Dans cette section, nous faisons une analyse empirique à l’aide d’une simple régression économétrique en vue de met-tre en évidence l’impact de la corruption sur l’investissement privé au Burundi. Nous présentons le modèle à estimer, les résultats économétriques et leur interprétation.

 

3.1. Présentation du modèle à estimer

 

Nous testons les effets de la corruption sur l’investisse-ment privé à l’aide du modèle ci-dessous dont les variables pour la plupart expliquent structurellement l’investissement privé dans un pays donné. A ces variables, nous intégrons, dans le modèle (1), la variable qui représente le niveau de cor-ruption, et dans le modèle (2), nous ajoutons la variable reflé-tant les épisodes de violences politiques pour essayer de cap-ter en même temps l’effet de la crise socio-politique que le Burundi a traversé depuis 1993. Le modèle de base est le sui-vant:

 

Invprivt   = a + bt  + mCorptt  + et

 

(1)Où Invprivt est le niveau d’investissement privé à l’année t, Corptt le niveau de corruption mesuré par l’indicateur de cor-ruption de la Banque Mondiale, qui fait partie des six indica-teurs de gouvernance présentés par Kaufmann et al. (2003).

 

La variable de corruption est initialement codée entre -2.5 et 2.5 et reflète le contrôle de la corruption. A l’instar de De-lavallade (2007), nous transformons cette variable pour dispo-ser d’un indicateur qui représente le niveau de corruption et prend des valeurs comprises entre 0 et 5 obtenue à partir de la transformation telle que Corptt= 2.5 − CorruptionBMXt repré-sente un ensemble de variables de contrôle dont le niveau des dépenses publiques (Depublt), la masse monétaire (mm2) qui capte le taux de crédit à l’économie, l’investissement public (Invput), le revenu national (Revt) capté par le produit inté-rieur brut et les épisodes majeurs de violence politique (Emvpt).

 

La forme finale de l’équation à estimer est la suivante:

 

Invpri  a + b Depub b Re v b Invpu  + b mm2 + b Emvp b Corpt e (2)

t            1           t      2        t      3        t       4        t      5          t      6          t      t

 

 

Toutes les données, mis à part, le niveau de corruption, sont issues de la base de données «World Development Indi-cators » de la Banque Mondiale et sont considérées pour la période allant de 1996 à 2013.

 

3.2. Résultats d’analyse et interprétation

Les résultats suivants ont été obtenus après avoir estimé l’équation (2) en utilisant la méthode des moindres carrés or-dinaires (MCO)17.

  1. La méthode des moindres carrés ordinaires est une méthode économétrique qui minimise la somme des écarts au carré utilisée, dans le cadre de cette étude, à cause de la courte période d’étude qui limite le nombre des observations.

 

Tableau 2: Résultats de la régression

 

 

Variable expliquée :

(1)

(2)

investissement privé

 

 

 

 

 

Dépenses publiques

0.042

0.040

 

 

 

 

(4.58)**

(2.31)*

 

 

 

Masse monétaire

0.072

0.072

 

(3.73)**

(3.73)**

Investissement publique

-0.009

-0.009

 

(1.65)

(1.95)

Niveau de corruption

-1.024

-1.055

 

(2.81)*

(3.20)**

 

 

 

Le revenu national

5.515

5.372

 

(11.33)**

(7.17)**

La violence politique

 

-0.023

 

 

(0.19)

 

 

 

Constante

-108.671

-105.266

 

(12.00)**

(6.47)**

R2

0.98

0.98

N

18

18

 

Source : Tableau réalisé par l’auteur à partir des résultats fournis par le logiciel Stata11

 

Dans la colonne (1) du tableau ci-haut nous présentons les résultats du modèle dans lequel la variable, «épisodes ma-jeures de violences politiques», n’est pas prise en compte. Ce-ci nous permet de voir dans les résultats de la colonne (2) le rôle que pourrait avoir joué la crise socio-politique de 1993-2005 sur l’effet de la corruption sur l’investissement privé au Burundi.

 

Les t-student marqués d’un * (respectivement **) indi-quent la significativité des coefficients au seuil de 5% (respectivement 1%). Les résultats de la régression économé-trique indiquent que les coefficients des variables ont tous le signe attendu et sont statistiquement significatifs sauf celui de l’investissement public qui, du reste, n’est pas significatif. Les dépenses publiques, la masse monétaire et le revenu national influence positivement l’investissement privé tandis que le niveau de corruption et les violences politiques exercent un effet négatif sur ce dernier.

 

Comme indiqué dans la plupart des travaux empiriques, notre variable d’intérêt, la corruption a un effet négatif sur l’investissement privé au Burundi. Lorsqu’on introduit, dans la colonne (2), la variable reflétant les épisodes de violence politique, on se rend compte que, non seulement elle impacte négativement l’investissement privé, mais en plus elle ampli-fie l’effet de la corruption sur l’investissement privé (le coef-ficient du niveau de corruption passe de -1,024 à -1,055). Le coefficient de la constante est négatif, ce qui laisse entendre que d’autres conditions structurelles, non prises en compte dans le modèle, découragent les investissements privés au Bu-rundi. On pourrait citer ici le problème d’accès au finance-ment pour les entrepreneurs et les investisseurs, les taux d’im-position prohibitifs et non concurrentiels par rapport à la sous-région, un environnement macroéconomique instable, le man-que criant des infrastructures de transport et de communica-tion, l’insuffisance d’énergie, etc.

 

En tout état de cause, nos résultats indiquent que la cor-ruption fait partie des facteurs qui découragent l’investisse-ment privé au Burundi et son effet est amplifié par les crises socio-politiques que traverse souvent le pays.

 

CONCLUSION

 

Conformément à la plupart des travaux empiriques sur d’au-tres échantillons de pays, la corruption a des effets néfastes sur l’investissement privé au Burundi. En effet, celle-ci agit comme une taxe supplémentaire d’investissement qui décou-rage les investisseurs locaux et étrangers, lesquels préfèrent des activités de spéculation et de courte échéance à la place des investissements de grande envergure porteurs de croissan-ce et générateurs d’emploi.

 

Par ailleurs, la littérature empirique montre que, du fait du comportement rentier et prédateur qu’entretient la corruption, celle-ci étouffe l’esprit d’initiative et d’entreprise. La situation est d’autant plus alarmante que le Burundi affiche des niveaux de corruption les plus élevés de la Communauté Est-Africaine et qu’il est en même temps défavorisé sur tous les autres plans (infrastructures, enclavement, éducation, stabilité politique, etc.). Cela dessert énormément le Burundi dans la mesure où les investisseurs potentiels seront toujours tentés de se tourner vers les pays voisins plus attractifs.

 

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